On a toujours besoin d’un plus petit que soi.

Temps de lecture : 2 minutes

Sur le blog Pascal Perrat « Entre 2 lettres » vous trouverez chaque samedi une suggestion d’écriture créative. Aujourd’hui voici l’accroche: « C’est au cours d’un repas de famille qu’il eut une révélation. Aucun membre n’avait comme lui des yeux de merlan frit, mais tous avaient quelque chose de poissonneux. Le tonton, par exemple, c’était son air saumon ». Imaginez la suite de cette révélation

J’ai frayé dans les eaux troubles pour vous pêcher cette bafouille. Bonne lecture.

C’est au cours d’un repas de famille qu’il eut une révélation. Aucun membre n’avait comme lui des yeux de merlan frit, mais tous avaient quelque chose de poissonneux, des écailles aux branchies. En ce dimanche tous avaient très envie de frayer pour la fête du corail en fleur. Lui, fringant Napoléon, présidait la table-récif, à l’affût de la moindre queue de poisson, se méfiant tout de même de l’anguille sous roche.

Le tonton, par exemple, c’était son air saumon, pas frais comme un gardon. Par contre la cousine saumonée voulait faire la nique à la dorade et ses copines de véritables thons. Pour cela elle n’avait pas lésiné sur le bling bling. Colliers d’algues brunes, pendants d’oreilles en porcelaine, bracelets de coquillage et de nacre. Elle portait une jupette de coquilles d’ormeaux sur lesquelles le soleil se reflétait. Une vraie boule à facette. Pour sûre qu’elle ne passait pas inaperçue. C’était sans compter, la nouvelle amie de Polochon, une crevette au corps loin d’être plat comme celui de la limande, drapé dans une robe fuseau mettant en valeur son décolleté généreux, dans lequel le vieux Triton assis en face, aurait bien aimé y plonger. Tandis que les vieilles bernicles et les « pâles-lourdes » s’indignaient de son comportement de morue, la belle riait à gorge déployée des blagues des sardines qui narraient par le menu comment elles s’étaient débarrassées de leurs maquereaux. C’est à ce moment que Nemo posa la question qui stoppa net toutes les conversations.

─ Dis parrain Napoléon, pourquoi dit-on chausser ses lunettes, on ne les met pas sur les nageoires caudales ?

─ Parce que le verbe « chausser » veut dire ici mettre les lunettes sur son nez.

─ Mais pourquoi on dit une paire de lunettes comme une paire de chaussures ? Il n’y a qu’un seul nez.

─ Nous avons deux yeux donc nous avons besoin d’une paire de lunettes.

─ Alors on devrait dire chausser une paire d’yeux. Nos yeux ne sont pas des petites lunes.

Embarrassé Napoléon supplia Doris du regard, mais celle-ci resta muette comme une carpe.

─ Fini donc ta salicorne Nemo, tu vas me faire perdre la tête et blanchir les écailles.

─ Bin non ta tête est toujours accrochée à tes épaules, et tes écailles sont toujours arc en ciel. Vous avez de drôles de façons de parler les adultes.

Napoléon comprit à cet instant que peu importait la taille, et l’âge. L’intelligence pouvait se loger dans le plus petit d’entre eux. Nemo serait son successeur comme chef de famille.

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16 Comments

  • Ohhh c est trop mignon, toute la poissonnerie 🐠 y passe et tes jeux de mots sont charmants 🙂
    Quand à la fin, elle résume parfaitement les enfants de nos jours, vifs, curieux et stimulants !
    Merci pour cette jolie histoire !

    • COOKI Patrick, Mais comment tu fais pour mettre ainsi un petit poisson dans ton commentaire? Encore un privilège des adeptes de la « pomme » 🙂
      Merci de te lecture. Bon week -end

  • Comme d’habitude, super plume…
    J’adore cet humour à vous couper le souffle enfin dans l’eau pas très pratique…
    Il s’agit juste de remonter à la surface…
    C’est vraiment un délice de te lire et bonne continuation.
    Patricia

    • CC Merci Patricia. J’aime en effet faire rire ou distraire mes lecteurs 🙂 Bon week end

  • En voilà une nouvelle bien rafraîchissante ! Toujours bien écrite, beaucoup d’humour et d’imagination. Au plaisir de prochaines lectures
    Nadiège

    • Merci Nadiège, je regarde actuellement l’un de mes inspirateurs en matière d’humour et de jeux de mots / l’ami Pierrot (Pierre Perret)

  • Excellent texte, court et efficace avec toute l’artillerie écaillée et ton humour qui n’a pas « déraillé » à son habitude :). Bravo, et ça me donne envie de m’y essayer. Je vais aller fureter chez Entre 2 lettres ! Merci pour la lecture, la découverte et belle journée à toi. Sabrina.

    • Hello oui c’est la magie de faire circuler sur nos blogs les stimulations d’écritures créatives d’autres blogs:) A bientôt de te lire

  • Les jeux de mots sont exquis à souhait. Servis sur un plateau alléchant de coquillages, crustacés, la marée du jour nous offre une farandole de savoureuses rimes maritimes. Bravo pour cette jolie plume. Marie Christine

    • Un bol d’air marin parmi la marée du jour comme tu dis, cela nous revigore n’est ce pas? Merci de ton passage:)

  • un récit iodé à souhait comme on les aime dans l’Agenda Ironique auquel je participe tous les mois 😀 je me demande si la crevette ne se prend pas pour une langouste !

    • Hello Gibulène, 🙂 oui excellent cette idée de langouste 🙂 Je viens de découvrir l’agenda ironique, et j’aime l’idée,je tente d’y participer tous les mois cette année.

  • Ben voilà ! Quelle imagination !!! Les exercices de l’agenda ironique vont t’aller à merveille, je n’en doute pas. Tu en donnes un nouvel exemple qui met de bien bonne humeur. Merci !

    • hello Nadine, oui je découvre cette activité des agendas ironiques sur plusieurs blogs et je trouve là un, une belle motivation à susciter notre capacité créatrice.

  • Ah ah Super texte!! Qu’il est drôle cet échange poisson improbable! 🙂 Merci pour la parenthèse en ce dimanche paresseux.
    Bises

    • Hello Audrey, merci de ton enthousiame

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