Il était une « foie ».

Temps de lecture : 4 minutes

L’agenda ironique de février proposé par Joséphine sur Nervure et Entailles, nous invite à jouer avec « le diable au corps ». Il s’agit de choisir un élément du corps, membre, organe, tissu, cellule, liquide substance.  Ou encore coin, pli, bout, trou, articulation ou protubérance, bref une partie de celui-ci et d’engager un monologue en le personnifiant. Je vous invite à découvrir https://josephinelanesem.com/2022/02/01/le-diable-au-corps/

Quant à moi, foi de Mijo, laissez-moi pour cette fois, vous conter les doléances de mon foie.

─ Allô Mijo, c’est ton foie qui parle.

« Allons bon, je n’ai bu que du « peace » mémé, et j’entends des voix. Je ne m’appelle pas Jeanne pourtant »

─ Non, mais écoutez moi cette effrontée, elle me snobe, je vais te lui mettre un coup de spasme, elle ne va pas m’ignorer longtemps, la gourmande.

« Aïe, ouh la la, ça fait mal ! voilà que j’ai des points de côtés, sans effort sportif ! FFF, une table au salon de thé Bergamote, juste devant le chariot des pâtisseries, n’était pas la meilleure idée du week -end »

─ Ah tu fais moins la maligne, à lécher de façon indécente ton doigt que tu as odieusement passé dans la coupelle de chantilly. -Mais elle continue à s’empiffrer ma parole- Aux grands maux les grands remèdes, je vais lui envoyer une nausée des profondeurs.

« Beurk, c’est quoi cette vague acide qui vient me baigner les amygdales ? Qu’est ce qui m’arrive ? Une gorgée de thé noir des Balkans ça va faire descendre cette remontée gastrique. Hop Hop. »

─ Tu ne vas pas t’en tirer en noyant le problème. Tiens je vais me dilater, histoire de thromboser ton pancréas. Tu finiras bien par arrêter de te goinfrer pour combler ton vide affectif et calmer cette colère qui gronde en toi. J’en ai marre moi d’éponger tous tes excès à la moindre contrariété, de me gaver de tous tes stress mal digérés ou d’encaisser les coups de Trafalgar de la vie que tu refoules. Je suis seul à bosser moi, pendant que rate et pancréas se la coulent douce. C’est de l’exploitation, moi aussi je vais enfiler mon gilet jaune et te déclencher nausées et ma copine la bile va se rappeler à ton bon souvenir. Non mais tu t’es vue avec ton teint cireux – et tes yeux jaunes de crocodiles- ! Il est grand temps de te mettre au vert, j’étouffe avec toute cette graisse que tu absorbes ou que tu fabriques dans ta sédentarité à te morfondre sur ton sort. Cesse donc de te la jouer victime avec une hygiène alimentaire de naze dont je paie les frais.

« FFFFF, ça ne passe pas. Et qui c’est celui-là qui me vient me faire la morale ?  Je dois avoir de la menthe poivrée ou de l’estragon dans ma trousse -secrets de fille- Voilà quelques gouttes d’huile essentielle sur la langue et je serai soulagée, le millefeuille à la crème de pistache avec éclat de carmel beurre salé me fait trop envie, même si je suis déjà bien calée avec les trois scones chantilly et confiture de framboises. »

─ Tu rêves si tu penses t’en sortir avec un tour de passe-passe. –  Je suis en Bluetooth avec ton cerveau, vais lui commander la grosse céphalée- Tu finiras bien par m’écouter et tu reprendras ta vie en main, en cessant tes orgies sucrées.

« Et merde, mais qu’il se taise cet abruti. Il me donne mal à la tête. J’ai assez de cette barre sur le front qui m’agace. (Un rôt gargantuesque pointe sa musicalité que j’étouffe tant bien que mal, me fait rougir. Heureusement le bruit des conversations et de la musique ambiante m’a aidé à camoufler cet inopportun trublion). Je me sens lourde d’un coup, je n’ai pourtant pas la panse remplie de cailloux comme celle du loup du Chaperon Rouge. Faut que j’arrête, je suis foutue, je bouffe trop. Si je continue il me faudra un cercueil sur mesure et y’a pas de soldes en ce domaine. Ça va coûter un bras à mes gars »

─ Yo, le gros intestin, vas y envoie la cascade de la mitraillette des flatulences pestilentielles.

─ Je lui mets aussi quelques crampes intestinales à la gloutonne. En avant la révolte HEPATITIS sur le gras.

─ Merci mon potto. Nous allons lui donner une bonne leçon à cette morfale des pâtisseries. Adieu éclair, religieuse, Saint-Honoré et Paris Brest. Remisé vacherins, fraisiers et forêts noires. Et surtout adieu les croissants aux amandes ! Je vais te lui déclencher une grève du système biliaire moi. Je vais contacter poumons, reins. Nous allons lui apprendre notre mission de gardien de la santé du corps dont les médecins ne parlent pas.

« Et voilà l’autre clown qui veut immortaliser mon double menton. Comment peut-il croire que je vais lui payer le moindre centime pour avoir sous les yeux l’étendue de mon mal être avec tous ces bourrelets qui débordent, et me font le pneu disgracieux sur la bedaine. Le fameux tablier de peau me guette. Allez l’addition et je m’tire d’ici. »

─ Bravo courage fuyons ! Allez les gars ont met la gomme dans les malaises, elle est mûre pour basculer dans la prise de conscience.

En rentrant chez moi, la devanture de la librairie L’escalier attira mon attention. La thématique me sautait aux yeux « Votre corps vous parle », «Langage émotionnel du corps », « Racines familiales de la mal- a- dit » « Chaque symptôme est un message, grand livre de la Métamédecine », « Dis-moi où tu as mal, je te dirai pourquoi », « Les maux de l’âme et du corps : grandir, aimer, guérir », « Le pouvoir guérisseur du corps ».

Je me mis à hoqueter. Quelle drôle de vie, je pète maintenant et je rote. Mon corps serait-il une femme-orchestre sans que je le sache ? Dès le lendemain après une nuit d’insomnies, réveillée par des borborygmes, issus de tous les orifices de mon corps, jusqu’aux remontées gastriques menaçantes jusqu’aux narines avec en prime ou en cadeau du foie, des brûlures de l’œsophage, j’ai foncé m’acculturer sur cette mission ma foi, salvatrice de mon corps.

C’est ainsi que mon foie et moi sommes devenus amis. Grâce à lui, j’ai entrepris un virage à 360° dans ma vie, me suis mis au vert alimentaire, au bleu apaisant de la mer, et laisse libre court à mon imagination littéraire.

Je me suis bien amusée avec cet agenda de février. Pour éviter toute collusion avec qui que se soit, j’ai préféré utiliser le je.

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20 Comments

  • Bonjour,
    Aïe ! Le foie, un organe qui ne se laisse pas malmener impunément ! Heureusement, le mien me laisse tranquille pour le moment (pourvu que ça dure !).
    Belle et douce journée !

    • Merci Sandra, effectivement le foie est un véritable cerveau de notre corps dont on ne parle pas souvent…l’apprivoiser très vite est un truc qu’on ne nous apprend pas.

  • Et coucou !
    Comme d’hab’ je me suis bien amusée et j’ai même reconnu quelques trucs au passage 😉
    J’ai aussi lu tes poèmes et suivi ton parcours short edition… wouaoww, quelle production, chapeau !
    Bises,
    Valérie

    • Cooki Valérie, ravie de ton passage. Oui le cercueil sur mesure et les non soldes de l’objet sont un clin d’oeil à Sandrine 🙂

  • Merci pour cette participation sincère et si haute en couleurs ! ou en saveurs 😉 Je suis contente que votre foie et vous soyez réconciliés.

    • Merci Joséphine pour cette proposition d’écriture et votre venue ici 🙂

  • Eh ben ! On l’a échappé belle, heureusement qu’il y avait trop de monde chez Bergamote ! Il faut toujours écouter son foie, on n’a pas le choix de toute façon.
    Toujours beaucoup d’humour dans tes créations.
    Bises
    Nadiège

    • Comme tu dis Nadiège, le foie nous mène la vie rude 🙂

  • Ahahah quel bon moment ! une bonne tranche de…rire
    Mais aussi une base de réflexion sur cette frénésie alimentaire
    dans nos sociétés.
    Content que tout soit rentré dans l’ordre 🙂
    Bien vu Mijo

    • Cooki Patrick, merci de ton passage 🙂

      • J’ai souri en vous lisant et trouvé ce foie pas si paresseux que cela tant il dispende de l’énergie pour alerter sa propriétaire (qui n’est peut-être pas l’auteur, à l’instar d’un Alain, pesant 50 kg tout mouillé, et chantant: »On est f…tu, on mangé trop »🙂

        • Merci Lyssa Mara de votre passage. Oui c’est bien vu, c’est le message en filigrane..comme le dit la chanson »On est foutu on mange trop »

  • La chair est faible, heureusement que le foie est fort. J’adore ton histoire.

    • Merci John de ta venue ici. Oui j’ai hésité avec un texte plus audacieux et voluptueux sur la chair qui est faible…

  • J’ai beaucoup souri en lisant ce texte qui décrit bien une certaine réalité difficilement supportable.
    Et, comme j’aime en général, la fin est heureuse.

    • Bonjour, merci de votre passage sur ce blog. Oui j’aime aussi les fins heureuses 🙂

  • Excellent !
    Bravo, le foie, ne te laisse pas faire, résiste !

    • merci Jean-Louis d’être venu me lire sur le fil de l’écriture:)

  • Bon jour,
    Je retiens : « Votre corps vous parle »… le vôtre ne fait semblant de vous parler, à bon escient sans doute 🙂
    Bonne journée
    Max-Louis

    • Merci max-Louis de ta venue, et comme tu dis le foie ne mâche pas ses mots, heureusement le mien est plus soft.;faut dire que je le chouchoute le bougre.;c’est je crois le 2ème cerveau 🙂

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